Après de longs mois où les prix de l’énergie (gaz, électricité, pétrole) étaient en constante augmentation (reprise économique post-épidémie entraînant une forte demande, un hiver relativement froid notamment), le début du conflit russo-ukrainien a entraîné une certaine inquiétude supplémentaire des acteurs des marchés de gros quant à l’approvisionnement en énergie de l’Europe.

Cette inquiétude s’est traduite par une hausse brutale des prix du gaz entraînant par la suite une hausse des prix de l’électricité (le gaz représente 15 % de la consommation d’énergie primaire en France).

I Qu’est-ce que sont les marchés de gros de l’énergie ?

Selon la CRE, le marché de gros est “le marché où l’électricité est négociée (achetée et vendue) avant d’être livrée sur le réseau à destination des clients finaux (particuliers ou entreprises) via le réseau”.

A Les acteurs des marchés de gros

Une myriade d’acteurs divers les composent, d’abord les producteurs d’électricité/gaz qui négocient et vendent leur production. Ensuite les fournisseurs qui négocient et s’approvisionnent en électricité afin de la vendre aux clients finaux pour la consommation. Puis, les négociants qui assurent la liquidité du marché par des ordres d’achat et de vente (il s’agit de la capacité d’un actif à être échangé rapidement, sans que cela n’ait d’impact majeur sur les prix du marché). Enfin les opérateurs d’effacement, qui vendent les capacités non utilisés sur le marché (avertis par le fournisseur ou le consommateur).

Ce sont les gestionnaires de transport (RTE et GRTGaz) qui assurent l’équilibrage – entre la demande (soutirage) et l’offre (injection) – des réseaux en temps réel.

B Les produits échangés

  1. 1 Les produits spots (ou au comptant)

Il existent les produits journaliers (day ahead)

Il s’agit de produits livrés le lendemain. Ils peuvent se connecter entre eux par « blocs » afin de correctement représenter les « contraintes du parc de production ». Le prix des produits journaliers est fixé au moyen d’enchères communes par les NEMO opérant en France, et ce, avant 13h00. Il s’agit du prix de référence de l’électricité en France et est un indicateur de l’équilibre offre-demande chaque jour.

Ces prix sont extrêmement volatils. En effet, des contraintes techniques (difficulté de stockage de l’électricité à grande échelle), incidents, travaux sur le réseau ou des conditions climatiques peu favorables (températures basses notamment) peuvent influer positivement sur le cours des prix.

Ensuite il y a les produits infra-journaliers (within day)

Ces produits sont livrés le jour même. Il s’agit de produits horaires, demi-horaires ou par blocs de plusieurs heures.

  1. 2. Les produits à terme

Il existe les produits futures qui consistent en l’achat ou la vente de produits livrés à une date ultérieure (jusqu’à plusieurs années). Le prix est déterminé à la date de conclusion du contrat entre les parties. Il s’agit de produits standardisés (par exemple 1MWh en base ou en pointe) pour faciliter les échanges.

Ensuite les produits forwards sont des contrats directement négociés entre les parties ou par le biais d’un intermédiaire avec une flexibilité sur les périodes de livraison plus importantes.

Les prix de l’électricité à terme sont déterminés par les anticipations des agents sur les prix du marché spot sur une période donnée. Ils sont moins volatils et permettent aux producteurs et fournisseurs de couvrir leurs risques et ainsi calculer le prix de l’électricité pour les clients finals

II Depuis 2021, une tendance haussière quasi-constante

Il est important de comprendre comment sont déterminés les prix sur les marchés de gros. Concernant l’électricité, le prix spot est déterminé par le coût de la mise en route de la dernière centrale électrique connectée au réseau (qui bien souvent, est au gaz ou au charbon).

Pour le moment, c’est bien le gaz naturel qui représente la majeure partie des énergies dites “pilotables”. Par conséquent si le prix du gaz s’envole, le prix de l’électricité suit la même tendance.

B Des pistes de réflexion

L’économiste Jacques Percebois propose des mécanismes en faveur d’une décorrélation du prix de l’électricité de celui du gaz afin d’en limiter la volatilité (autrement dit, que lorsque le prix du gaz augmente drastiquement, le prix de l’électricité ne suive pas d’emblée la même tendance).

Et que les acteurs de marché calquent dans une moindre proportion leurs anticipation futures (sur les marchés à terme) sur les prix du marché spot (qui peuvent grimper très vite à la suite de circonstances conjoncturelles notamment selon les saisons ou des incidents ponctuels sur le réseau européen par exemple). L’inquiétude des marchés quant à de possibles pénuries immédiates poussent les anticipations vers une hausse plus importante des prix “à terme”.

Sources :

– GRDF, Le gaz dans le mix énergétique français : https://www.grdf.fr/entreprises/gaz-energie-mix-energetique-francais

– CRE, Le marché de gros de l’électricité : https://www.cre.fr/Electricite/Marche-de-gros-de-l-electricite/presentation-du-marche-de-gros-de-l-electricite

– Le JDD, Pourquoi les prix de l’énergie ne vont pas baisser, 1/01/2022 : https://www.lejdd.fr/Economie/pourquoi-les-prix-de-lenergie-ne-vont-pas-baisser-4085519

A propos de Eva-Luce BAILLY