A l’heure de la transition : quels effets sur l’emploi ?
La transition énergétique pourrait induire une transformation profonde de l’économie. Une inquiétude particulière concerne l’emploi : la transition va-t-elle engendrer une destruction de nombreuses professions ? Ou à l’inverse sera-t-elle synonyme de création d’emplois ?
Entre discours très optimistes et propos alarmistes, le sujet fait régulièrement l’objet d’instrumentalisation : comment démêler le vrai du faux ?
Une transition propice à l’emploi
Pour beaucoup, la réponse peut paraitre évidente : la transition sera propice à l’emploi, ne serait-ce qu’à travers le développement des énergies renouvelables ou de la rénovation énergétique. La transformation envisagée des moyens de production et la volonté de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans des secteurs comme l’industrie peuvent donner lieu à un besoin de compétences nouvelles. Dans son rapport, L’emploi : moteur de la transformation bas carbone The Shift Project précise que « Onze secteurs ou sous-secteurs représentant 4 millions d’emplois et étant les plus directement concernés par la décarbonation (transports, logement, agriculture, certaines industries, etc.) font l’objet d’une analyse quantitative qui aboutit à une croissance nette modérée de la demande de main-d’œuvre à horizon 2050 (de l’ordre de + 300 000 emplois), cachant de fortes créations (1,1 million) » [1].
L’ADEME dans ses évaluations macroéconomiques de la stratégie bas carbone en France présume également des effets positifs de la transition sur l’emploi avec la création « de 540 000 emplois (en équivalent temps plein « ETP ») d’ici à 2030, qui pourrait atteindre 1 million d’emplois à l’horizon 2050 »[2]. Il faut préciser que cela reste un ordre de grandeur qui pourrait se révéler si les objectifs bas carbone sont effectivement poursuivis.
Une transition destructrice d’emplois
Toutefois, il est possible que la transformation vers une société bas carbone ne soit pas uniquement favorable à l’emploi. En effet, certaines filières encore fortement émettrices de dioxyde de carbone pourraient être amenées à disparaitre. Par exemple, le passage du véhicule thermique à la mobilité décarbonée va induire une profonde modification du secteur de l’automobile et des emplois associés. Dans son étude Territoire et Emploi en transition écologique, Réseau Action Climat précise que « L’Observatoire de la métallurgie pointe en 2021 le risque de perdre 90 000 emplois d’ici 2035 à l’échelle de la filière automobile. »[3]. Cette activité ne serait pas la seule impactée par la transition, la métallurgie ou le charbon pourrait également voir leur effectif fortement réduit. Cette situation représente un risque pour des territoires qui vivent grâce à ces activités. La problématique dans ces lieux est alors de remplacer ces métiers pour garder le même niveau économique.
Une transition nécessiteuse de formations
Les conséquences réelles de la transition énergétique sur l’emploi restent difficiles à déterminer. Elle va certainement amener à un changement au sein de nombreuses filières. La formation professionnelle apparait déjà comme un outil indispensable pour répondre au besoin en ressources humaines et pour permettre aux personnes travaillant dans les secteurs les plus touchés de trouver un emploi similaire.
L’anticipation est alors la clé : il faut anticiper les compétences qui seront nécessaires à la transition. Selon Thomas Gaudin, économiste à la direction Prospective et recherche de l’ADEME, le manque de moyens humains est à constater dans le secteur de la rénovation énergétique ce qui constitue un frein à « la massification » de la rénovation des logements. Ainsi, la transition énergétique va demander une adaptabilité renouvelée de nombreuses filières pour atteindre les objectifs fixés.
[1] Rapport, L’emploi : moteur de la transformation bas carbone, The Shift Project, page 7
[2] https://infos.ademe.fr/magazine-octobre-2021/dossier/transition-ecologique-et-emploi-un-cercle-vertueux/
[3] Etude réalisée par Réseau Action Climat, Territoire et Emploi en transition écologique, page 17