Les ZAEnR visent une prise en main de la politique énergétique nationale à l’échelle locale. La définition des ZAEnR est présentée ci-dessous, suivie de l’exposé des raisons de leur mise en œuvre. Pour finir, les difficultés pratiques de cette procédure expliquant le retard pris pour l’identification de ces zones sont expliquées.
Que sont les ZAEnR ?
La loi nᵒ 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables dite loi APER, instaure les zones d’accélération des énergies renouvelables (ZAEnR). Ce sont des zones présentant un potentiel énergétique. Elles sont définies, pour chaque catégorie de sources et de types d’installation de production d’énergies renouvelables, en tenant compte de la nécessaire diversification des sources d’énergie et de la puissance d’EnR déjà installée. Elles ont également pour objectif de contribuer à la solidarité entre les territoires et à la sécurité des approvisionnements.
Plus précisément, son article 15 détaille la manière dont ces zones sont arrêtées.
En premier lieu, l’État et les gestionnaires de réseaux publics d’énergies ont mis à disposition les informations nécessaires à l’évaluation du potentiel énergétique renouvelable et de récupération mobilisable sur le territoire.
Ensuite, les communes arrêtent les ZAEnR sur leur territoire après concertation du public selon des modalités librement déterminées.
Une conférence territoriale a lieu pour transmettre la cartographie départementale au comité régional de l’énergie (CRE).
Une fois l’avis positif du CRE recueilli, le référent préfectoral arrête la cartographie des ZAEnR pour les communes qui le concernent.
Quelles sont les raisons de l’instauration des ZAEnR ?
Tout d’abord, en 2020 la France était le seul État membre de l’Union européenne à ne pas avoir atteint ses objectifs en matière d’énergies renouvelables. Pour corriger cela, l’imposition d’objectifs nationaux (logique descendante) se couple à une planification locale de la politique énergétique nationale (logique ascendante). Le point de rencontre entre ces deux mécanismes se situe au niveau du Comité régional de l’énergie qui évalue si les ZAEnR arrêtées sont « suffisantes » pour répondre aux objectifs nationaux régionalisés.
L’échelle locale est donc au cœur de la transition énergétique. Cette position centrale est réaffirmée par le fait que la concertation de l’échelon local est un levier primordial pour une meilleure acceptabilité sociale des projets. L’acceptabilité sociale constituant un des freins majeurs aux projets EnR, ce travail réalisé en amont sur la définition de zones où ces projets seront les bienvenus est donc une manière de faciliter le déploiement des EnR.
Quelles sont les difficultés de mise en œuvre ?
Il est possible d’aborder ici la problématique du délai très contraint et complexe à tenir. Seulement six mois étaient donnés pour identifier les zones à l’échelle communale et, dans ce même laps de temps, effectuer un débat au sein de l’EPCI.
Selon certains, ce retard pourrait être dû à un manque de soutien apporté aux communes. En ce sens le député Henri Alfandari énonce que « le travail des élus locaux est laborieux, surtout à l’échelon communal où les élus ne se sentent pas assez accompagnés »[1].
Il reste que la raison principale semble être l’insuffisance d’ingénierie territoriale due au manque de moyen financier et humain des communes. En ce sens, Auréline Doreau [2] « l’échelle communale est celle où les élus ont le moins d’ingénierie territoriale »[3] et qu’il faudrait « clarifier les compétences énergie-climat des collectivités locales et leur donner davantage de moyens »[4].
Factuellement, l’Institut de l’économie pour le climat a analysé les besoins d’investissements et d’ingénierie pour la neutralité carbone des collectivités. Cette étude, publiée en octobre 2022, montre que le déploiement des EnR d’ici à 2025 nécessite à l’échelle intercommunale 0,6 équivalent temps plein (ETP) et à l’échelle régionale entre 5 à 10 ETP[5].
En attendant…
Les données de raccordement disponibles pour 2023 et début 2024 montrent que le rythme de déploiement des projets est insuffisant pour tenir les objectifs européens pour 2030[6].
Lorsque l’exercice d’identification des zones est réalisé, d’autres difficultés se présentent :
- Les « patatoïdes » correspondant à l’acceptation d’une EnR sur l’ensemble du territoire sans réelle réflexion, complexifiant l’interprétation concrète en mode projet.
- La création de zones d’exclusions, alors que ces dernières ne pourront entrer en jeux qu’après la validation du caractère suffisant des ZAEnR au niveau régional.
- Les passagers clandestins, comme le caractère suffisant s’évalue à l’échelle régionale, toutes les communes ne fournissent pas le même effort dans la production d’EnR
- Le choix du photovoltaïque quasi systématique, techniquement simple et plus accepté socialement, délaissant les EnR thermiques et les éoliennes terrestres
Toutefois, Didier Soulage[7] est positif, voire enthousiaste en déclarant « de mon expérience, je n’ai jamais vu une telle mobilisation sur une réglementation de ce genre, surtout sans expérimentation préalable »[8].
[1] Un an après, la loi d’accélération des énergies renouvelables patine par manque d’impulsion politique (https://www.aefinfo.fr/depeche/708837-un-an-apres-la-loi-dacceleration-des-energies-renouvelables-patine-par-manque-dimpulsion-politique)
[2] Responsable de projets énergie et territoires au sein du Cler – Réseau pour la transition énergétique
[3] https://www.aefinfo.fr/depeche/708837-un-an-apres-la-loi-dacceleration-des-energies-renouvelables-patine-par-manque-dimpulsion-politique
[4] https://www.actu-environnement.com/ae/news/loi-aper-zones-acceleration-enr-zaer-planification-energie-43892.php4
[5] I4CE Collectivités : les besoins d’investissements et d’ingénierie pour la neutralité carbone (figure 4 page 6)
[6] https://www.aefinfo.fr/depeche/708837-un-an-apres-la-loi-dacceleration-des-energies-renouvelables-patine-par-manque-dimpulsion-politique
[7] Chargé de mission énergies renouvelables au CEREMA
[8] https://www.actu-environnement.com/ae/news/loi-aper-zones-acceleration-enr-zaer-planification-energie-43892.php4