Invasion d’algues vertes en Bretagne : une marée verte toxique ?
L’action coup de poing de Greenpeace a remis sur le devant de la scène l’importance du problème des algues vertes, présentes en grande partie en Bretagne. L’ONG a ainsi déversé près d’une tonne d’algues sur le parvis de la préfecture de Quimper dans le Finistère pour demander l’arrêt des fermes-usines. Mais en quoi ce végétal est-il nocif ?
Les algues vertes sont des éléments essentiels de l’écosystème marin. Elles sont aussi nommées “laitues de mer” à cause de leur aspect de salade, mais aussi parce qu’elles sont comestibles. Elles prolifèrent chaque année sur les côtes de Bretagne et de Normandie. Ce phénomène est survenu pour la première fois en 1971 et s’est accentué d’année en année. Ces algues polluent chaque année les plages des côtes nord-ouest françaises. Et elles ne sont pas inoffensives : leur prolifération provoque de graves problèmes environnementaux et sanitaires. Elles provoquent à la fois une asphyxie de la faune et la flore aquatique, mais leur décomposition émet aussi des gaz toxiques qui, à une certaine concentration, peuvent être mortels pour les humains. De nombreuses morts d’animaux et de personnes ont eu lieu depuis plusieurs années.
L’une des morts les plus marquantes reste celle de Thierry Morfoisse en 2009. Il est décédé d’un infarctus, pendant son travail, alors qu’il véhiculait des algues vertes en décomposition. Il aurait sans doute inhalé de grande quantité d’hydrogène sulfuré (H2S). Le tribunal des affaires de la Sécurité sociale avait reconnu “le caractère professionnel” de cette mort, requalifiée en accident de travail en 2021. Mais la “faute inexcusable” de la société Nicol Environnement pour laquelle Thierry Morfoisse travaillait n’a pas été reconnue. La famille a interjeté appel.
Les algues vertes alimentées par l’élevage intensif
Pourquoi la prolifération s’est accélérée ces dernières années ? La cause majeure est l’élevage intensif, activité majeure dans la région. L’industrialisation de l’élevage a été continue depuis la période d’après-guerre. Ce domaine a, en plus, été favorisé par la Politique Agricole Commune européenne (aussi appelée PAC). La Bretagne est la première région de France en termes de production de produits d’origine animale, tels que les œufs, la viande de porc, de volaille, de veau ou encore le lait.
Comme son nom l’indique, le principe de l’élevage intensif est de regrouper un grand nombre d’animaux au mètre carré. Qui dit beaucoup d’animaux dit beaucoup de déjections, animaux qui rejettent énormément de nitrates dans les sols et les cours d’eau. Résultat : les cours d’eau bretons se classent parmi les plus chargés en azote de toute l’Europe : les concentrations de nitrates par litre sont 10x supérieures par rapport à une eau de référence sans pollution humaine. Et ces taux élevés font proliférer les algues vertes dans des quantités bien supérieures à la normale.
Les conséquences sur l’économie locale
L’activité économique bretonne est basée en grande partie sur son élevage industriel, qui favorise la prolifération des algues vertes, mais aussi par le tourisme, qui est impacté par cette même prolifération. Les autorités publiques font prévaloir les intérêts économiques avant les intérêts environnementaux et sanitaires. Malgré la situation, le gouvernement affaiblit l’encadrement des autorisations d’élevages industriels sur les côtes. La règlementation ICPE, qui autorise les installations de ce genre, est affaiblie. Les fermes-usines vont continuer de s’implanter et la prolifération des algues qui va avec.
Bretagne : les algues vertes prolifèrent et l’Etat laisse faire – Greenpeace France