L’exploitation minière des fonds marins consiste à racler le sol océanique pour en extraire des minerais essentiels, répondant ainsi aux besoins croissants de la transition numérique, écologique et énergétique. La question de ces ressources et de leurs extractions est primordiale puisqu’elle soulève des controverses à la fois économiques, géopolitiques et environnementales.
L’enjeu économique des ressources dans les fonds marins
La révolution numérique a permis à un nombre croissant de personnes d’accéder à des appareils de plus en plus divers et sophistiqués : smartphones, ordinateurs, et bien encore. La transition écologique et énergétique requiert aussi ces matériaux rares pour la fabrication d’éoliennes, de panneaux photovoltaïques, ou de voitures électriques. Pour répondre à ces besoins croissants, certains Etats (principalement les Etats miniers et industriels) aimeraient pouvoir profiter de l’autorisation d’exploiter les fonds marins, qui regorgent de ces ressources. Ils avancent que cette solution serait plus économique que l’extraction dans les minerais, avec notamment un coût social moins important.
Parmi ces ressources figurent notamment les terres rares, essentielles à la production d’appareils électroniques. On les trouve dans les fonds marins sous forme de nodules polymétalliques (fer, manganèses, cuivre, cobalt, nickel), d’encroûtements cobaltifères (cobalt, platine, métaux rares), ou encore d’amas sulfurés (zinc, cuivre, or, argent, métaux rares).
Certaines start-up ont déjà mené des campagnes de prospection, avec l’intention de déposer une licence d’exploitation pour pouvoir exploiter les fonds marins explorés. Ce sont des parties prenantes de fait, car elles participent aux débats, en affirmant notamment que les moyens utilisés pour l’extraction n’auraient qu’une incidence environnementale moindre.
L’enjeu environnemental de l’exploitation des fonds marins
Les fonds marins sont encore trop peu connus, selon le monde scientifique. Ils sont ainsi en grande majorité inexploités.
Le fait d’exploiter les fonds marins en raclant le sol présenterait un risque environnemental considérable, en premier temps sur la biodiversité. Il n’y a pas encore eu d’études réalisées sur l’effet des techniques utilisées pour l’exploitation minière (ratissage des grandes surfaces, sédiments en suspensions) sur l’environnement. Mais il y a aussi un risque de pollution sonore et lumineuse qui accompagne l’extraction.
L’exploitation des fonds marins aurait aussi un effet sur le climat. En effet, les fonds marins agissent comme des puits carbone, c’est-à-dire qu’ils absorbent les émissions de CO2. Cette pratique pourrait alors conduire à rejeter du CO2 qui était stocké auparavant dans les fonds marins. Le fait de perturber l’écosystème qui s’y trouve pourrait avoir des conséquences désastreuses, et encore plus si cette pratique venait à être autorisée et démocratisée.
Un test d’extraction avait été réalisé dans les eaux japonaises en 2020, et le constat n’était pas concluant, puisque la moitié des poissons et crustacés avaient disparus de la zone.
Pour l’instant, on est en présence d’un vide juridique au niveau international concernant l’exploitation des fonds marins.
Le droit international sur la question de l’exploitation des fonds marins : un enjeu politique
Pour l’instant, la question de l’exploitation des fonds marins repose sur un vide juridique, car il n’y a pas de dispositions à ce propos.
Cependant, une décision du Parlement norvégien du 9 janvier 2024 a autorisé la prospection minière dans l’océan Arctique, en vue d’une exploitation future. Elle le justifie au motif que les ressources qui s’y trouvent seraient nécessaires pour la transition écologique. Mais le Parlement, le 10 janvier 2024, vote contre l’exploitation (mais pas contre l’exploration). Cela a engendré des discussions internationales au sein de l’Autorité Internationale des Fonds Marins, qui travaille sur un Code Minier depuis 2016.
La communauté internationale se divise en 2 camps. Le camp majoritaire (Allemagne, Espagne, Canada, Brésil…) est pour un moratoire, c’est-à-dire d’attendre que des études scientifiques soient réalisées au préalable avant de se lancer dans l’exploration des fonds marins. Ce serait alors une sorte de principe de précaution préconisé au niveau international, puisqu’aucune autorisation d’exploitation ne serait délivrée sans qu’il y ait d’abord eu des recherches scientifiques sur le sujet. Le second camp (Chine, Inde, Russie, Belgique) serait pour une autorisation, car les ressources seraient essentielles pour la transition verte. Il s’agit principalement de pays proches de ces fonds marins qui seraient privilégiés pour l’exploitation de ces fonds. D’après une prise de parole du président Emmanuel Macron de 2022, la France se positionnerait pour l’interdiction complète de l’exploitation des fonds marins.
Les 168 Etats qui composent l’AIFM sont en discussion depuis le 15 juillet 2024, pour 3 semaines, et pourraient aboutir vers l’adoption d’un Code Minier international.
Sources :
- https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/exploitation-miniere-des-fonds-marins-la-france-et-les-ong-en-alerte-2083212
- https://www.lemonde.fr/comprendre-en-3-minutes/video/2024/01/23/quels-risques-pose-l-exploitation-miniere-des-fonds-marins-comprendre-en-trois-minutes_6212432_6176282.html
- https://www.goodplanet.info/2024/01/10/exploitation-miniere-des-fonds-marins-la-norvege-a-finalement-vote-contre-mais-autorise-la-phase-exploratoire/
- https://www.lemonde.fr/planete/article/2024/07/20/au-sommet-des-fonds-marins-les-debats-scientifiques-pollues-par-la-politique_6253494_3244.html