You are currently viewing L’inévitable réduction de la part du nucléaire dans l’approvisionnement énergétique français.

            Malgré d’ardents défenseurs de l’électricité nucléaire autant politiques, que médiatiques ou universitaires, il semble que ce mode de production d’électricité tendra à disparaitre d’ici les prochaines dizaines d’années vu l’actualité normative et les objectifs définis par les pouvoirs publics.

            L’énergie nucléaire inquiète, c’est ce qui apparait dans un sondage de l’IFOP (IFOP pour Sortir du Nucléaire, 2022) indiquant que 46% de la population française est inquiète par rapport à la production d’électricité par des centrales nucléaires. De plus, l’intense actualité des deux dernières années en rapport avec des considérations écologiques, économiques, politiques et stratégiques dans l’approvisionnement en énergie oblige les différentes institutions à règlementer le marché de l’énergie et à prévoir d’ambitieuses politiques énergétiques tournées vers l’énergie verte. Mais restera-t-il de la place pour l’énergie nucléaire dans ces objectifs pour demain ?

            Si les débats se concentrent aujourd’hui sur une énergie « décarbonée », le nucléaire a une place spécifique dans ces débats car étant une source d’énergie électrique « bas carbone ». L’énergie nucléaire est la principale source d’électricité française avec, cependant, d’énormes impacts environnementaux. Il reste notamment la question des déchets nucléaires et leur impact sur les générations futures et le suivi des déchets nucléaires dans le temps.

            Ce statut à part du fait de son exploitation faiblement émettrice en CO2 et son caractère indispensable fait qu’il existe un flou sur son caractère « vert » ou non. Cela s’illustre parfaitement avec la taxonomie verte européenne (Parlement européen, 2020). Ce règlement créé un « label vert » pour une activité correspondant à au moins un des objectifs environnementaux énoncés à l’article 9 (« l’atténuation du changement climatique; l’adaptation au changement climatique; l’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines; la transition vers une économie circulaire; la prévention et la réduction de la pollution; la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystème »), sans porter de préjudice significatif aux cinq autres, et ce, tout en respectant des garanties minimales matière de droits humains et de droit du travail.

Il y a aussi les activités « habilitantes » qui permettent à d’autres activités d’atteindre les objectifs environnementaux et les activités « transitoires » qui correspondent aux activités pour lesquelles il n’y a pas d’alternatives « bas carbone » mais dont les émissions de gaz à effet de serre les plus basses qu’il soit dans le secteur.

Il y a quelques semaines, lors de la rédaction de cet article, j’écrivais que l’énergie nucléaire aurait pu faire partie de ces activités « transitoires ». Or, il n’était aucunement fait mention du nucléaire dans ce règlement. C’est la Commission européenne qui a proposé d’intégrer l’énergie nucléaire dans la catégorie des activités « transitoires » pour peu qu’il y ait des garanties en matière de traitement des déchets et de démantèlement des installations nucléaires en fin de vie, s’il y a un permis de construire une nouvelle centrale avant 2045 ou la réalisation de travaux pour prolonger la durée de vie des réacteurs avant 2040. Cette proposition a depuis obtenu la validation par le Parlement en novembre 2023, les technologies de fission et de fusion nucléaire peuvent désormais faire l’objet d’investissements dans les mêmes conditions que les autres industries vertes. 

La production d’électricité par les centrales nucléaires n’étant alors que transitoire, ce n’est plus une fin. Il est heureux de se dire cela, notamment à cause du changement climatique dont les sécheresses empêchent certaines centrales nucléaires de fonctionner faute d’eau.

            La seule alternative pour que l’énergie nucléaire continue d’exister d’ici les dizaines d’années qui vont venir semble aujourd’hui être celle des réacteurs à sels fondus au thorium. Mais le modèle n’étant aujourd’hui que théorique, ce type de production d’électricité ne verra le jour que dans des dizaines d’années (Sortir du nucélaire, s.d.) (International Atomic Energy Agency , 2023)

            Au vu des objectifs Futurs énergétiques 2050 et des délais de développement et de construction des centrales nucléaires (par exemple, la durée de construction prévue pour le réacteur pressurisé européen de Flamanville de dix-sept ans), la survie du nucléaire parait impossible si les objectifs sont respectés.

Les objectifs de Futurs énergétiques 2050 (RTE, s.d.) prévus par RTE (Réseau de transports d’électricité français) dans le meilleur scénario reposent sur un mix énergétique composé à 100% d’énergies renouvelables en 2050, mais tous les scénarios prévoient une baisse progressive de la part du nucléaire dans la production électrique française.

Récemment, la loi n°2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables se concentre sur les énergies solaire et éoliennes (Parlement français, 2023), pour lesquelles le développement est censé être accéléré.

Le nucléaire ne paraît alors aujourd’hui que n’être qu’une solution de secours, mais dont les conséquences peuvent être difficiles à assumer, ce pourquoi les pouvoirs publics semblent vouloir sortir de cette dépendance.

Sources :

IFOP – Sortir du nucléaire. (2022, Janvier). Récupéré sur https://www.sortirdunucleaire.org/IMG/pdf/resultats_sondages.pdf

IFOP pour Sortir du Nucléaire. (2022, Janvier). Les Français et l’énergie nucléaire. Récupéré sur https://www.sortirdunucleaire.org/IMG/pdf/resultats_sondages.pdf

International Atomic Energy Agency . (2023, mars 13). Thorium’s Long-Term Potential in Nuclear Energy: New IAEA Analysis. Récupéré sur https://www.iaea.org/newscenter/news/thoriums-long-term-potential-in-nuclear-energy-new-iaea-analysis

Parlement européen. (2020, Juin 18). RÈGLEMENT (UE) 2020/852 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 18 juin 2020 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables et modifiant le règlement (UE) 2019/2088. Récupéré sur https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32020R0852

Parlement européen. (2020, juin 18). RÈGLEMENT (UE) 2020/852 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 18 juin 2020 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables et modifiant le règlement (UE) 2019/2088. Récupéré sur https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32020R0852

Parlement français. (2023, mars 10). OI n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables . Récupéré sur https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047294244/

RTE. (s.d.). Futures énergétqiues 2050. Récupéré sur https://rte-futursenergetiques2050.com

Sortir du nucélaire. (s.d.). Le réacteur au thorium : une nouvelle impasse. Récupéré sur https://www.sortirdunucleaire.org/Le-reacteur-au-thorium-une-nouvelle-impasse