Le démantèlement des parcs éoliens : un processus nécessaire, bien que coûteux et polluant

 

Source : https://www.lesechos.fr/weekend/planete/le-recyclage-des-eoliennes-en-france-mythe-ou-realite-1915105

Le démantèlement des éoliennes constitue une obligation normative à la charge du développeur du projet éolien qui doit s’occuper de la sous-étape du recyclage et la remise en état du site. Cependant, le processus de recyclage des composants d’éoliennes est beaucoup plus complexe qu’il n’y parait.

 

La phase technique préalable au démantèlement : le pré-démantèlement

Premièrement, afin de comprendre la problématique générée par le recyclage et le traitement des matériaux en fin de vie, il est nécessaire de détailler les parties qui composent une éolienne :

  • Nacelle et moyeu : acier et composites de résine, de fibres de verre et carbone,
  • Pales : composites de résines, de fibres de verre et carbone,
  • Mât : béton et acier,
  • Transformateurs et installations de distribution : déchets électroniques et électriques,
  • Fondations : béton et acier.

En effet, un appel à projets publié par RECORD (projet n° 2-13/2022) a proposé quelques éléments à considérer avant le démantèlement d’une éolienne. Ces éléments sont associés au coût du démontage avant le recyclage et, également, après de leur valorisation. Cela fait référence, entre autres, aux besoins des moyens techniques et humains, l’infrastructure à bâtir, les plateformes et les grues, par exemple.

 

La phase de démantèlement

À titre énonciatif, les étapes des travaux pendant le démantèlement, y compris le recyclage, sont[1]:

  1. Le démontage des éoliennes, les aérogénérateurs postes et câbles électriques ;
  2. L’excavation totale des fondations ;
  3. Le décaissement des aires de grutage et des chemins d’accès et le remplacement par des terres de caractéristiques comparables aux terres à proximité de l’installation ;
  4. La valorisation ou élimination des déchets de démolition et de démontage d’une éolienne dans des filières dûment autorisées à cet effet.

Dans cette phase intermédiaire, se déroulent quelques techniques de tri et de transport des composants des éoliennes. Ce procédé constitue une condition nécessaire et préalable pour passer à la dernière étape dénommée valorisation et l’élimination des déchets.

De cette manière, le processus de démantèlement d’une éolienne, ainsi que celui de la production, sont considérés comme des démarches complexes. En effet, cette source d’énergie renouvelable est considérée propre depuis la phase de génération d’électricité, mais leur processus d’installation et de démantèlement devient assez coûteux pour l’environnement à cause des déchets générés par leurs composants.

 

Les effets sur l’environnement 

Les principaux matériaux polluants d’une éolienne sont les fondations en béton en son mât en acier et/ou béton. Chacun parmi eux émettre 7 % de CO2 à l’échelle mondiale.[2]

En fait, il existe d’autres matériaux présents comme les pales qui « sont constitués de matériaux composites (mélanges de résines thermodurcissables, époxy ou de polyesters et de fibres de verre/carbone) difficiles à recycler[3]».

La majorité des composants d’une éolienne peuvent être recyclés, c’est le cas de la nacelle. Nonobstant, les pales ne sont pas considérées comme recyclables. À cause de ce phénomène, le projet RECORD met en évidence la tendance, au niveau mondial, d’enfouir les morceaux des pales dans un centre de stockage.

Cela démontre qu’il y a une espèce d’encombrement de ces pales en fin de vie. C’est la raison pour laquelle il est indispensable de faire face à cet inconvénient en réfléchissant au coût de leur démontage, ainsi qu’aux coûts de transport pour les amener vers les usines de recyclage.

Une deuxième problématique concerne le traitement des terres rares. En effet, le « Néodyme » et le « Dysprosium » utilisés pour fabriquer les aimants permanents de certains modèles contiennent environ 30 % des terres rares dont la quantité abonde pour les éoliennes en mer, mais pas pour les terrestres[4].

Entre ces terres, selon les études, nous trouvons l’acier, minerai qui est totalement recyclable, tandis que le béton se réutilise sous forme de granulat ou dans la fabrication de béton neuf[5]. Ainsi, d’après l’ADEME, une éolienne peut être recyclable à plus de 90 %.

Étant donné que l’extraction de ces minéraux est vitale pour la fabrication des composites des éoliennes, il faut bien prendre des mesures qui puissent diminuer l’impact sur l’environnement. En particulier, il est possible de diminuer les indices de telles extractions en soutenant des investissements dans la filière de recyclage de terres rares. Pour ce faire, il y a lieu à anticiper des coûts humains de transport et environnementaux nécessaires pour le processus de recyclage, au lieu de continuer d’investir dans l’extraction de ces matériaux.

Cela constitue une opportunité plus soutenable pour diminuer la pollution des milieux naturels, en diminuant le processus d’exploitation méthanier et aussi des nombreux produits chimiques qu’il faut utiliser, mais aussi pour valoriser ces déchets par le recyclage.

C’est le cas du fabricant danois Vestas qui a annoncé, en février dernier, avoir mis au point un procédé chimique qui permettrait de recycler les pales des éoliennes d’hier et d’aujourd’hui. Ce procédé chimique vise à décomposer la résine d’époxy[6] en matériaux qui pourront être utilisés dans la fabrication de nouvelles éoliennes ». Il s’agit, en effet, « d’une réaction entre un composé et un solvant en présence de catalyseurs qui a pour objectif de briser les liaisons covalentes pour retrouver les monomères qui composent l’époxy. Des monomères qui, une fois traités, pourront être retransformés en résine[7] ».

Pourtant, l’entreprise n’ayant pas détaillé  son procédé, dont le projet se trouve déjà dans la deuxième étape du développement, en collaboration avec la société de recyclage nordique Stena Recycling, a été fortement critiqué par des observateurs ; cela en raison de l’utilisation de tel traitement chimique qui pourrait être peu respectueux de l’environnement[8].

 

Solutions

Concernant les morceaux des pales, ils « peuvent être broyés et valorisés comme combustibles (CSR) dans les cimenteries afin de remplacer les combustibles fossiles traditionnels, d’éviter la production et propagation des déchets pour fabriquer de nouveaux matériaux composites[9]. » L’inconvénient principal est la capacité de stockage des filières qui s’en occupent.

Cette solution a été mise en place par l’Université de Washington (USA), en collaboration avec General Electrics (GE) et Global Fiberglass Solutions Inc. (GFSI) de Seattle, en développant l’Ecopolycrete, produit obtenu à partir du broyat des pales qui a de nombreux usages, en particulier, des dalles de sol, des glissières de sécurité, des plaques d’égout, par exemple. « En moins d’un an, GFSI a recyclé 564 pales selon cette technique[10]».

De surcroît, il est possible de mettre en œuvre l’upcycling (retour à une matière équivalente). Celui-ci s’agit de recycler la fibre de carbone afin d’éviter les émissions de CO₂ dans sa fabrication proche de 40 t.

Normativité

Au niveau européen, il n’existe pas encore une réglementation qui encadre de manière spécifique les déchets des matériaux composants des éoliennes. Toutefois, la directive 2008/98/CE relative aux déchets peut être une référence dans la matière, car elle établit des points clés comme :

  • La responsabilité élargie du producteur ;
  • Le principe du pollueur-payeur ;
  • Le recyclage et la valorisation ;
  • Le traitement spécial qui s’applique aux déchets dangereux.

Par sa part, la France a considéré les éoliennes terrestres, dans les deux arrêtés déjà cités, comme des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) dont « le démontage doit être anticipé en prenant en compte l’avis du maire de la commune d’implantation et celui du propriétaire du terrain[11]. » 

Ainsi, le traitement et le recyclage des éoliennes sont encadrés par l’article R. 515-106 du code de l’environnement français et les éoliennes ne pouvant pas être réutilisées dans son intégralité, la priorité va au recyclage[12].

Pour l’instant, il est conseillé de mettre en pratique des différentes technologies utilisées et valorisées pour la gestion des composants de ces types des déchets, en vue d’éviter une augmentation de la pollution sur l’environnement, ainsi que faire un pari pour la valorisation énergétique performante de ces déchets en tant que Combustible Solide de Récupération.

 

Pour aller plus loin : Utilisation des combustibles solides de récupération – Ademe

[1] Le démantèlement et le recyclage d’un parc éolien. Engie Green. https://www.engie-green.fr/wp-content/uploads/2023/03/fiche-Demantelement-BD.pdf#:~:text=Depuis%20le%201er%20juillet%202020%2C%20la%20Loi%20fixe,15%20000%20tonnes%20de%20mat%C3%A9riaux%20composites%20par%20an.
[2] Le recyclage des éoliennes en France : mythe ou réalité? – Les Echos Planète
[3] Nathalie Blanc. Composition des composites. Sciences ouest N° 357. Décembre 2017 Composition des composites | Espace des sciences (espace-sciences.org)
[4] Les terres rares dans l’éolien – Info éolien (info-eolien.fr)
[5] Les echos planète. Op cit.
[6] Après qu’elle a été séparée des fibres du composite.
[7] MAYER Nathalie. Enfin une solution pour recycler toutes les pales. Révolution Énergétique – site d’information spécialisé sur la transition énergétique. Enfin une solution pour recycler toutes les pales d’éoliennes ? (revolution-energetique.com)
[8] Ibidem.
[9] Record. Recyclage et valorisation des composants d’éoliennes – Etat de l’art technico-économique et perspectives. Appel à projet n° 2-13 / 2022. Programme 2022.
[10] Ibidem, p. 3-4.
[11] Engie Green. Op.cit.
[12] Ibidem.