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« Travailler plus longtemps parce qu’on vit plus longtemps, c’est logique, mais par contre, il faut pouvoir avoir un travail », déclarait en décembre 2018 l’ancienne ministre du Travail Muriel Pénicaud. C’est un réel paradoxe en France. Alors que le gouvernement, dans sa réforme des retraites de 2017, prévoyait d’instaurer un âge pivot pour retarder l’âge de départ à la retraite, les plus de 60 ans ont du mal à retrouver un emploi. Même si l’âge pivot a été concédé lors des négociations avec les partenaires sociaux en 2019, l’âge de départ à la retraire est de nouveau d’actualité en 2022 avec les élections législatives. En effet, la réforme des retraites souhaitée par Emmanuel Macron fait l’objet de nouvelles discussions en vue d’être mise en place au cours de son deuxième mandat. Parmi les réflexions à mener autour de cette réforme, l’âge apparaît comme le point le plus crucial notamment pour parvenir à l’équilibre du système des retraites. 

Le taux d’employabilité des séniors en France

Le taux d’emploi des seniors en France est l’un des plus bas d’Europe. Certes en France, le taux d’emploi des 50-64 ans a augmenté ces dix dernières années passant de 53,9% en 2010 à 62,1% en 2018. Dans les détails, on constate que passer 59 ans, le taux d’emploi dégringole pour la tranche d’âge des 60-64 ans. En effet, le taux d’emploi des 55-59 ans est de 72,1% contre 31,0 % pour les 60-64 ans d’après les chiffres de l’INSEE[1]. Dans l’Union européenne, ce taux est de 42 % en moyenne, selon un rapport France Stratégie d’octobre 2018.

Le vieillissement de la population ainsi que les différentes réformes de retraite, ont augmenté le nombre d’actifs séniors. Après la réforme des retraites de 2003, faisant passer l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62, on constate une hausse du taux d’emploi des 55-64 ans, mais elle a aussi eu un impact négatif sur le coût des arrêts maladie. Dans un rapport de l’Assurance maladie publié en 2018[2], le montant de l’indemnisation maladie a augmenté de 15% entre 2010 et 2016, passant de 6,2 à 7,1 milliards d’euros. Ainsi, les politiques en faveur de l’emploi des séniors sont essentielles.

L’image des séniors en entreprise

Les salariés de plus de 50 ans doivent faire face à beaucoup de stéréotypes liés à leur âge. D’après l’étude de l’association À Compétence Égale[3], en 2018, le premier frein cité par les séniors et les recruteurs est le coût pour embaucher un salarié sénior. D’autres stéréotypes sont également évoqués dans cette étude comme la surqualification, la « difficulté à être managé, difficulté d’intégration des équipes plus jeunes et la faible adaptation aux nouvelles technologies ». Autre problématique qui a souvent été évoquée, c’était le retour sur investissement. Un sénior serait un « salarié proche de la retraite […] perçu comme disposant de moins de temps qu’un candidat plus jeune pour exprimer son potentiel au sein de l’entreprise ; le « retour sur investissement » serait ainsi trop court pour être rentable. »[4]. Cependant, cette vision court-termiste est moins présente aujourd’hui, même si elle reste un frein important. D’après l’étude À Compétence Égale, ce critère à l’embauche se classe septième par les recruteurs en 2018[5].

A l’inverse, cette population a des atouts très importants pour toutes les entreprises qu’on n’oublie bien trop souvent. Leurs principales qualités sont « l’expérience-connaissance, la transmission-échange et l’ouverture-agréabilité »[6]. Cette catégorie de salariés va pouvoir transmettre leur véritable savoir-faire à l’ensemble de l’équipe.

L’évolution du système de retraite en France impactant l’emploi des séniors

La réforme des retraites est un grand sujet d’actualité qui a engendré un mouvement social de grande ampleur en 2019. En effet, le gouvernement s’est engagé dans un projet autour de la réforme des retraites. Dans cette crise sociale, on parle énormément de l’emploi des séniors puisqu’une des approches était la modification de l’âge du départ à la retraite. La question qui se pose ainsi, est de savoir comment faire pour que ces personnes travaillent plus longtemps ?

Aujourd’hui, l’âge légale de départ à la retraite est fixé à 62 ans en France et il peut aller jusqu’à 64-65 ans pour le taux plein. L’âge effectif de départ à la retraite en France est autour de 63 ans, mais dans certains pays, on est déjà autour de 67 ans comme le Portugal[7], et on évoque déjà pour certains pays, le travail jusqu’à 70 ans. Les problématiques sont assez fortes, et dans l’ensemble du monde occidental, on se pose la question de savoir comment faire pour que plus de personnes puissent travailler plus longtemps ?

Pendant longtemps, le taux d’emploi des séniors était faible, cela était dû en partie au dispositif de départ à la retraite anticipée et l’abaissement de l’âge de départ à la retraite de 65 à 60 ans. Les pouvoirs publics, ainsi que les partenaires sociaux espéraient favoriser l’emploi des autres tranches d’âges en évinçant les séniors du marché du travail. Certaines politiques de Gestion des Ressources Humaines ont complètement exclu les séniors du marché du travail, de la formation, de la promotion. Mais le déséquilibre entre cotisants et retraités est un réel problème de nos jours. C’est dans ce contexte qu’une volonté de politique de changement émerge de la part des pouvoirs publics et des partenaires sociaux centrés sur le maintien des salariés âgés en activité notamment grâce à la qualité de vie au travail.

En effet, la qualité de vie au travail entre en jeu lorsque nous parlons d’employabilité, de dialogue social, de mobilité, de bien-être au travail et de gestion de l’emploi et des compétences. Ces différentes dimensions sont indispensables pour maintenir l’employabilité des séniors au sein de l’entreprise en les rendant plus performants, et en leur donnant de la considération.

Sources :

[1] INSEE, Tableaux de l’économie française, Emploi par age, 2020

[2] Assurance maladie, Améliorer la qualité du système de santé et maitriser les dépenses, AMELI, 2018, p. 40-41

[3] À Compétence Égale, les séniors et l’accès à l’emploi, 2018, p. 17

[4] LOISEL JP., op. cit., p. 11

[5] À Compétence Égale, op. cit., p. 18

[6] COLETTE, BATAL, CARRE et CHARBONNIER, op. cit., p. 74

[7] Le Télégramme, Retraites. À quel âge part-on en Europe ?, 2019

A propos de Chloé BECKER