Le Black Friday a été l’occasion pour beaucoup de se rendre en magasin ou sur internet pour profiter des différentes offres et promotions. Un évènement pourtant promouvant la surconsommation, dont le secteur chef de file est certainement celui de la mode, en particulier de la fast fashion.
Une industrie à l’éthique douteuse
Le système, tel qu’il fonctionne actuellement, est basé sur le fait que des multinationales basées dans des pays occidentaux délocalisent leur production dans des pays du tiers monde, en vue d’y trouver une main d’oeuvre peu chère. Le souci, c’est que le droit du travail, et parfois globalement les droits de l’Homme dans ces pays ne présentent pas autant de garanties que dans les pays occidentaux. Résultat : des conditions de travail désastreuses selon Nayla Ajaltouni, membre du collectif Ethique sur l’étiquette entre chaleur, faim et soif, longues heures sans pause, travail 7 jours sur 7. Parfois même, ont lieu des catastrophes meurtrières pour cause de négligence par les grands groupes. Impossible ici de ne pas évoquer la catastrophe du Rana Plaza, ou l’effondrement d’un immeuble à Dacca, au Bangladesh, qui a provoqué la mort de 1135 personnes, alors que des consignes d’évacuation données la veille, après apparition de fissures dans les murs et plafonds, avaient été ignorées par les responsables des ateliers travaillant pour des marques internationales de vêtements.
Cette activité met en exergue les inégalités entre les pays développés et pauvres, ces derniers payant les conséquences de cette pollution. En 2021, la Banque mondiale estimait que d’ici 2050, 216 millions de migrants climatiques pourraient se déplacer vers les pays occidentaux, notamment issus de l’Asie de l’Est et du Sud. L’ONU estime plutôt que sur cette période-ci, environ 1 milliard de personnes seront obligées d’émigrer en raison d’évènements météorologiques extrêmes, comme la montée des eaux, les tempêtes ou encore les feux de forêts.
La deuxième industrie la plus polluante après celle du pétrole
D’abord, le traitement et la teinture du textile déversent dans l’eau des matières très polluantes. La consommation d’eau est par ailleurs astronomique, environ 4% de l’eau potable disponible dans le monde est utilisée pour la production de ces vêtements. Cela a également des effets néfastes pour la culture du sol, et l’alimentation des animaux élevés pour leur laine ou encore leur cuir.
L’acheminement de ces vêtements, fabriqués à l’autre bout du monde, génère une grande quantité de gaz à effet de serre, puisque le transport se fait le plus souvent en avion. En outre, la production de ces vêtements nécessite une consommation gourmande d’électricité, et exploite en majorité des ressources non renouvelables.
Enfin, une grande problématique se pose en raison de la gestion de ces déchets. En effet, avec les effets de mode, les consommateurs de fast fashion ne portent en moyenne leurs vêtements que 4 fois, estimant ensuite qu’ils ne sont plus à leur gout ou à la mode. Le monde entier utilise environ 80 millions de vêtements tous les ans, ce qui représente une hausse de 400% par rapport à il y a 2 décennies. On se débarrasse ainsi de 4 millions de tonnes de textile chaque année. On privilégie la quantité à la qualité, on dévalorise les vêtements de plus en plus, et cela est illustré par le fait que le budget consacré à la mode ne cesse de baisser depuis 10 ans.
Alors que faire de ces déchets ? Les brûler, tandis que cela engendrerait une pollution massive suite à l’évaporation de toxines ? Les donner dans des bennes destinées à être envoyées dans des pays pauvres, alors que des journalistes ont pu montrer que ces tonnes de vêtements atterrissaient dans de véritables décharges à ciel ouvert, leur quantité étant bien trop importante ? Aucune solution réellement viable ne semble avoir émergé.
L’exemple le plus parlant de ces industries ravageuses est certainement Shein, une marque de prêt à porter qualifiée d’”ultra fast-fashion”, puisque mettant en ligne plus de 500 nouveautés par jour, à des prix dérisoires. Ce site est extrêmement plébiscité par une grande partie des consommateurs occidentaux, mais fait pour autant l’objet d’énormément de critiques : qualité de vêtement déplorable, exploitation humaine, surconsommation…
Quelles solutions ?
Après ces constats peu réjouissants, il est opportun de se demander quelles solutions peuvent être apportées, notamment à notre échelle de citoyen. Alors que le boycott est pratiqué par certains, il est possible de continuer à consommer des vêtements, en favorisant la seconde main via des friperies, des boutiques associatives, ou encore des applications de revente, telles que Vinted. Des commerces locaux et responsables voient de plus en plus le jour également, pour ceux qui ont le plus de moyens. L’idée serait de remettre en question sa façon de consommer, en consommant tout d’abord moins, ou en réparant, en recyclant, et même en “upcyclant”.
Même s’il est évidemment toujours utile d’agir à l’échelle individuelle, l’impact le plus important serait bien entendu de modifier les normes de droit, que ce soit au niveau, français, européen ou international. En ce sens, le parlementaire Raphaël Glucksmann a annoncé le 16 janvier 2022 soutenir une directive européenne qui aurait pour objet de responsabiliser les multinationales de leur chaîne d’approvisionnement, en leur imposant un devoir de vigilance.
Sources :
https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/un-degre-de-conscience/fast-fashion-face-au-desastre-
ecologique-la-necessite-de-demoder-la-mode_5356564.html
Que deviennent réellement les vêtements que vous donnez ? – Sur le front avec Hugo Clément
https://www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2021/09/13/climate-change-could-force-
216-million-people-to-migrate-within-their-own-countries-by-2050
https://www.francetvinfo.fr/economie/industrie/shein-le-geant-chinois-de-lultra-fast-fashion-aux-
methodes-tres-critiquees_4923967.html
https://fr.wikipedia.org/wiki/Effondrement_du_Rana_Plaza