La sécurité énergétique comme un vecteur pour la transition énergétique

Les effets de la crise environnementale ont été multipliés ces dernières années et ont déclenché la sonnette d’alarme à l’échelle mondiale. Des objectifs ont ainsi été fixés, comme aboutir à la neutralité carbone, réussir une transition écologique efficace et garantir à l’intérieur des États le principe de sécurité énergétique.

Les émissions de GES. Les Echos. No. 23827. Vendredi 4 novembre

Les États, les organisations internationales et les mouvements citoyens cherchent une réponse urgente face aux conséquences inquiétantes du dérèglement climatique, de la COVID-19 et plus récemment de la guerre en Ukraine. En effet, le risque de pénurie d’électricité généré par les difficultés d’approvisionnement en gaz russe sur la desserte de l’UE, le renchérissement important du prix d’électricité et du gaz[1]  doivent intégrer l’agenda international, spécifiquement celui qui concerne la sécurité énergétique.

 

La politique de l’énergie: une compétence partagée

  1. Les autorités veulent assurer l’approvisionnement énergétique comme une réponse à la précarité qui arrive à pas de géant dans l’Union européenne. Non seulement il s’agit de mettre en place une alternative de production d’électricité, mais encore d’aboutir à la sécurité énergétique. Cette dernière étant comprise comme « la possibilité d’accéder à une source d’énergie fiable et plutôt bon marché »[2].

Au niveau de l’Europe, par exemple, l’énergie intègre des compétences partagées entre l’Union Européenne et leurs États membres lesquels peuvent établir des règles et adopter des actes juridiquement contraignants en matière d’énergie[3] en conformité aux articles 4 et 194 du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE).

Le premier paragraphe de l’article 194 du TFUE[4] relatif à la politique de l’Union européenne dans le domaine de l’énergie, dans un esprit de solidarité entre les États Membres, s’engage à assurer la sécurité de l’approvisionnement énergétique dans l’Union. 

Le deuxième paragraphe du même article réserve de son côté la compétence aux États de déterminer leur choix entre différentes sources d’énergie et la structure de son approvisionnement énergétique.

En raison de ces attributions, l’objectif de l’Union européenne et de leur États membres doit être de garantir une sécurité énergétique en reconsidérant l’extraction et le traitement de matières premières traditionnelles utilisés dans ces cas-là, comme les combustibles fossiles ; mais aussi de mettre en place ce principe de sécurité énergétique dans le but d’assurer encore la transition écologique et énergétique.

Cependant, certains États comme la Chine ne montrent pas une telle cohérence. La Chine est considérée comme le pays le plus pollueur de la planète, responsable d’environ 30% des rejets de CO2 du globe. Son absence de la COP26 à Glasgow et de la COP27 en Égypte, ne reflètent qu’un désintérêt vis-à-vis de la transition énergétique. En plus, son gouvernant, Xi Jinping, a précisé que « la Chine atteindrait son pic d’émission avant 2030 et la neutralité carbone avant 2060 ». Cette déclaration ne respecte pas sa promesse faite lors du XXe Congrès du Parti Communiste Chinois, surtout après avoir annoncé une augmentation de soutien au charbon, selon laquelle le pays doit tout faire pour assurer la sécurité énergétique.

 

 La sécurité énergétique : la simple question de la garantie de l’approvisionnement d’électricité ?

La période hivernale arrive et avec elle le risque d’un accroissement du prix de l’électricité, raison pour laquelle les institutions de l’Europe et les États membres sont préoccupés par le fait de garantir à leurs citoyens l’approvisionnement en électricité dont ils ont besoin et d’assurer parallèlement leur souveraineté énergétique.[5]

C’est le cas particulier de la France, qui a réussi à avoir des réserves suffisantes pour l’hiver 2022-2023 (95%). En effet, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a révélé que les réserves de gaz étaient pleines, comme une réponse effective à la crise, alors que les exportations du gaz russe vers la France se sont taries depuis septembre.

De plus, le pays a établi un paquet de deux textes sur le pouvoir d’achat qui comprend des mesures avec le but de protéger les consommateurs en cas d’une hausse des prix et à assurer la sécurité d’approvisionnement en énergie. Voici les textes en question[6] :

  • La loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat (n° 2022-1158)
  • La loi des finances rectificative pour 2022 (n° 2022-1157).

En dépit des efforts de l’Europe pour faire de la sécurité énergétique une priorité, et malgré l’urgence des pays d’aller rapidement vers la transition énergétique, il est évident que l’environnement est bien impliqué dans la problématique. A tel point que, selon le secrétaire général de l’Organisation Météorologique Mondiale, le secteur de l’énergie est responsable d’environ trois quarts des émissions de gaz à effet de serre (« la production et la consommation d’énergie sont à l’origine de près de 80 % des émissions de gaz à effet de serre d’origine anthropique au sein de l’UE »[7]). En conséquence de quoi, il est important d’accélérer la transition vers des formes de production d’énergie propre et de soutenir la diversification des approvisionnements en énergie, et enfin d’envisager un approvisionnement durable.

D’autre part, avec la sécurité énergétique, il ne s’agit pour les États que de garantir leur approvisionnement d’énergie, mais aussi de réduire leur dépendance aux importations. Cela revient à mobiliser de plus en plus les sources d’énergies locales afin de réduire leur dépendance à l’égard des combustibles fossiles liés à l’importation.

C’est pourquoi, la Commission européenne a proposé le Plan REPowerEU en mai 2022 avec lequel, en coopération avec les États membres,  l’UE met en place une plateforme énergétique qui soutient des achats communs d’énergie coordonnés pour tous les États membres, visant à diversifier des approvisionnements en énergie et à réduire la dépendance européenne aux hydrocarbures russes. C’est un avancement rapide vers la transition écologique.

Finalement, il faudra repenser les méthodes utilisées par les États pour qu’ils puissent faire efficacement leur transition énergétique en respectant le principe d’intégration formulé par l’article 11 TFUE qui vise à établir un lien entre la politique de l’énergie et la politique de l’environnement, ainsi que l’article 191 du même traité qui précise les objectifs de la politique de l’Union dans le domaine de l’environnement.

Sources :

https://www.capital.fr/economie-politique/reserves-de-gaz-pour-lhiver-quand-meme-une-bonne-nouvelle-pour-les-francais-1448089

https://www.tf1info.fr/international/crise-de-l-energie-l-europe-risque-de-manquer-de-gaz-pour-l-hiver-2023-2024-alerte-l-agence-internationale-de-l-energie-2237541.html

[1] L’ AJDA, dans son numéro 36/2022, a publié un dossier intitulé « Les mesures pour le pouvoir d’achat », constitué des articles suivants : Le volet énergie de la loi Pouvoir d’achat, par L. Fontenelle, p. 2054

https://www-dalloz-fr.scd-rproxy.u-strasbg.fr/documentation/Document?id=AJDA/CHRON/2022/2014

[2] Sécurité d’approvisionnement énergétique | Ministères Écologie Énergie Territoires (ecologie.gouv.fr)

[3] Lamoureux M. Droit de l’énergie. 2e édition, 2022,p. 82

[4] Ibidem, p. 85

[5] L. Fontenelle, p. 2054

[6] Ibid.

[7] op. cit. Lamoureux M, p. 78