You are currently viewing L’utilisation des eaux non conventionnelles : un moyen de lutter contre la rareté de la ressource

En 2022, nous avons dû faire face à un niveau de précipitations très faible. D’après Météo France, “la pluviométrie annuelle a présenté un déficit de 15 à 25% par rapport à la normale constatée entre 1991 et 2020”. Les mois de mai et de juillet ont même été les plus secs depuis 1959. À l’heure actuelle (décembre 2022), 17 départements français font toujours l’objet de restrictions d’eau. C’est pourquoi il semble plus qu’opportun de trouver des alternatives à cette sécheresse, parmi lesquelles l’encouragement à la sobriété, l’amélioration de l’efficience des usages, mais aussi l’utilisation des eaux non conventionnelles.  

 

Un encadrement assez ferme 

Il existe 3 sortes d’eaux non conventionnelles : les eaux usées traitées, les eaux de pluie et les eaux grises, c’est-à-dire des eaux domestiques faiblement polluées. Elles se distinguent assez logiquement des eaux conventionnelles, que constituent les eaux superficielles, retenues par les barrages et les lacs collinaires ainsi que les nappes d’eaux souterraines.  

Ces eaux peuvent aujourd’hui être utilisées en grande majorité pour l’irrigation, c’est-à-dire l’apport artificiel d’eau à des végétaux cultivés pour permettre leur développement correct. Cette irrigation peut également apporter des éléments fertilisants au sol ou aux feuilles ou encore lutter contre le gel sur les feuillages. Les eaux non conventionnelles peuvent également être utilisées à d’autres fins, comme par exemple les eaux usées de restaurants ou de salles de bain peuvent constituer une source de chaleur, par le biais de récupérateur de chaleur.  

Ceci étant dit, l’usage de ces eaux fait l’objet d’un encadrement assez rigide pour éviter tout risque sanitaire. La Haute Autorité de la Santé Publique a rendu en avril 2022 un avis sur les impacts sanitaires de l’usage éventuel d’eaux non conventionnelles en remplacement d’eau destinée à la consommation humaine. Dans ce document il est dit qu’un tel usage ne doit en aucun cas risquer de nuire à la santé des populations, et qu’ainsi, il doit être strictement encadré, précautionneux et regardant sur les dangers chimiques ou microbiologiques potentiels. Cela doit alors passer par une série de diagnostics territoriaux, par des expérimentations soumises à autorisations après avis de l’Agence Régionale de Santé ainsi que par l’information des citoyens.  

Ainsi, la consommation de ces eaux n’est pas encore possible en Europe, même si des perspectives d’évolution se profilent. En Vendée, une usine de recyclage des eaux usées a pour projet de transformer ces dernières en eau potable, d’ici fin 2023. Ce processus se déroulerait en 5 phases de traitement pour assurer l’obtention d’une eau de qualité, qui serait distribuée à plus de 200 000 vendéens par la suite. Il s’agit d’un projet révolutionnaire qui rend optimiste sur les perspectives de réutilisation de ces eaux non conventionnelles par la France, qui ne se présente par forcément en bon élève en la matière.  

 

Une méthode encore peu développée en France 

Alors que nos voisins espagnols réutilisent 15% des eaux usées à des fins industrielles et agricoles, en France, ce chiffre n’excède pas 1%. Un des pays pionner en la matière est certainement Israël, avec 90% de réutilisation des eaux usées. La France accuse donc un réel retard en la matière, et c’est pourquoi nos administrations tentent de développer le recyclage des eaux non conventionnelles.  

Lors des Assises de l’eau (2018-2019), des élus locaux, des acteurs de l’eau au niveau national et des comités de bassin ont pu se réunir pour mettre en place une série de mesures qui permettrait notamment de tripler l’utilisation des eaux non conventionnelles d’ici à 2025. Un décret du 11 mars 2022 permettant des nouveaux usages des eaux usées traitées, mis en place dans le cadre de la loi AGEC (anti-gaspillage pour une économie circulaire), a pu permettre de développer l’utilisation de ces eaux, en les autorisant par exemple pour le lavage de la voirie, pour l’hydrocurage des réseaux, ou encore la recharge de nappe phréatique. L’usage reste cependant limité, afin de rester dans le cadre des prescriptions nationales et d’éviter de prendre tout risque sanitaire. 

En outre, il existe des aides qui permettent de soutenir les collectivités ou acteurs privés à mettre en place des systèmes de réutilisation des eaux non conventionnelles. Par exemple, l’Agence de l’eau Loire-Bretagne subventionne jusqu’à 50% les communes, départements, régions, ou encore entreprises privées ou publiques locales qui entreprennent de mettre en place un tel projet, qu’il soit au stade de la réflexion ou de sa mise en œuvre.  

 

Toutes ces mesures sont autant de perspectives encourageantes sur l’utilisation des eaux non conventionnelles en France, ce qui aux vues des évolutions climatiques constitue un enjeu majeur.  

  

Sources :  

 

A propos de Mathilde BIOT